Les séances d'information sur les réalités économiques et des conduites culturelles en emploi au Québec Print
Written by Doudou Sow [email protected]   
Friday, 02 July 2010 12:31
 

 


                              

Le Québec a accueilli 45 221 immigrants en 2007. Selon les derniers chiffres fournis par le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles, les séances d’information sur les réalités socioéconomiques rejoignent en moyenne 3 500 immigrants par année.
Quant aux séances sur les conduites culturelles, elles rejoignent 1 000 personnes immigrantes par année. Ces statistiques font froid dans le dos compte tenu du nombre d’immigrants reçus au Québec annuellement.  Pourtant, ce n’est pas faute d’avoir essayé de faire la publicité de ces séances. Les nouveaux arrivants sont en effet informés par Immigration Québec, dès leur arrivée à l’aéroport, du nom et de l'adresse du bureau d’Immigration le plus proche de leur résidence. Ils doivent s’y présenter par la suite afin de connaître la date, le lieu et le nom de l’organisme où les séances devraient se dérouler. Cependant, la plupart d’entre eux, n’assistent pas, hélas, à ces séances. Ce qui est vraiment dommage compte tenu de leur pertinence.

 

Mais de quoi parle-t-on réellement dans ces séances?

 

THÈMES ABORDÉS LORS DES SÉANCES D'INFORMATION

 

1) Les réalités socioéconomiques

 

Une séance sur les réalités socioéconomiques de quatre demi-journées est offerte gratuitement aux nouveaux arrivants par deux organismes à but non lucratif : la Fondation Ressources-Jeunesse et le Centre Génération emploi.  La première journée, le formateur aborde le sujet relatif à l’Environnement sociopolitique du Québec en mettant l’accent sur le contrat moral et la Charte québécoise des droits et libertés, la géographie, l’histoire et la culture du Québec, le système politique canadien et le système politique québécois, la primauté de la langue française au Québec, les valeurs et les fondements de la société québécoise et les besoins de main-d’œuvre.

 

Lors de la deuxième journée, le formateur revient sur l’Environnement sociopolitique du Québec en abordant des thématiques reliées à l'économie québécoise, les besoins en main-d'œuvre, le système d'éducation et la formation continue, les lois sociales et la fiscalité.


La troisième journée, les réalités du marché du travail  sont passées au peigne fin notamment toutes celles qui touchent la préparation à une recherche d'emploi, l'adaptation et la compréhension des moyens pour réussir cette recherche d'emploi, la connaissance de soi, le curriculum vitae, la lettre de présentation et le rôle des ressources d'aide en emploi.

Finalement, la dernière journée complète la session sur les réalités du marché du travail articulées avec la thématique des stratégies de recherche d'emploi, des communications téléphoniques, de la préparation à l'entrevue et des diverses sources d'emploi.

Comme nous le voyons, ces séances permettent de comprendre le fonctionnement ainsi que les us et coutumes de la société québécoise mais aussi de cerner le contexte politique, social, juridique et institutionnel.  Les nouveaux arrivants qui ont déjà assisté à ces séances d’information sur les réalités socioéconomiques du Québec devraient ensuite se renseigner davantage sur les façons de faire au Québec en participant à des ateliers sur les conduites culturelles en emploi. Cet approfondissement de la connaissance de la société d'accueil leur serait des plus utiles et les aiderait dans leur recherche.

 

2) Les conduites culturelles en emploi au Québec

 

Cette séance de trois journées qui se donne à Immigration-Québec– Nord de Montréal cherche à conscientiser les Néo-Québécois sur l’importance de comprendre les enjeux culturels dans le milieu du travail québécois afin non seulement de les intégrer mais aussi de les maintenir en emploi.

Des mises en situation pratiques permettent aux personnes immigrantes de se faire déjà une idée des réalités du marché du travail en développant des habiletés et des connaissances pertinentes. Le Québec étant une société pragmatique, le nouvel arrivant se trouve, par ces exercices, imprégné des façons de faire de sa nouvelle société, en ce qui concerne la relation à autrui et la manière efficace et claire de communiquer avec ses collègues.

 

Dans cette session sur les conduites culturelles en emploi, le formateur aborde différents aspects reliés à la perception de la culture québécoise:

 

« rapport à l’autorité, mode de gestion des conflits, importance de l’individu par rapport au groupe, importance accordée aux règles et aux manières de s’y conformer, distance physique entre les individus, rapport au temps, manière de communiquer, gestion à la québécoise caractérisée par l’autonomie, la participation, l’égalité et le consensus ».

 

En bref, cette session cerne les principales dimensions de la culture québécoise.  Cependant, différentes questions restent posées au sujet de la programmation des séances pour rejoindre le maximum de personnes immigrantes qui travaillent souvent dans des centres d’appels avant de trouver un emploi dans leur domaine. On pourrait aussi envisager d'élaborer un partenariat avec les représentants du bureau des associations ethnoculturelles qui sont en contact permanent avec les membres de leurs communautés respectives comme nous l’avons suggéré dans notre article intitulé « L’utilité sociale des associations ethnoculturelles dans le domaine de l’action communautaire et la vie associative : le cas de l’Amicale des Ivoiriens du Canada1 ». Parce qu’elles sont proches de ces groupes de population et constituent aussi une force de mobilisation efficace, elles pourraient sensibiliser davantage les membres de leurs communautés à ces réalités.

 

Si certaines personnes immigrantes ne jugent pas pertinent d’assister à ces sessions pour plusieurs raisons (conseils malavisés de l’entourage, confusion de vitesse et précipitation), d’autres n’assistent pas à ces sessions pour des raisons liées à la survie comme nous le laisse entendre ce commentaire de Moustapha Sene, immigrant d’origine sénégalaise arrivé au Québec en septembre 2008 : « Si la personne se retrouve dans l’impossibilité de satisfaire certains besoins les plus fondamentaux (logement, nourriture, vêtements etc.) elle n’a pas le temps de suivre un encadrement, elle cherche plutôt du travail et n’importe lequel afin de recouvrer sa dignité humaine ».

 

Cette situation de survie peut effectivement pousser certains nouveaux arrivants à ne pas assister à ces séances d’information. D’où la nécessité de programmer ces formations dans des horaires de fin de semaine ou des horaires de fin de soirée comme M. Sene nous le suggère « Il faudrait en faire certaines le samedi ou le dimanche pour permettre à tous d’y participer.  Cela peut être une perspective à revoir » car poursuit-il « Ceci me paraît essentiel parce que ce sont surtout ces sessions d’information qui permettent aux nouveaux immigrants de connaître les opportunités qu’offrent les régions. Car au-delà de l’emploi, il y a l’environnement qui offre d’autres possibilités (temps de transport raccourci, davantage de possibilités d’obtenir une place pour les enfants dans les garderies, espace vital plus élargi). En plus de cela, il faut aussi mettre en exergue les possibilités de projets que les immigrants peuvent ficeler avec leurs pays d’origine et susceptibles d’être soutenus par la région d’accueil.  Tous ces facteurs permettront leur participation et les attireront vers les régions ».

 

Malheureusement, il arrive trop souvent que celui qui n’a jamais assisté à ces séances d’information conseillera hélas au nouvel arrivant, qui se trouve être son ami, son parent ou la personne qui loge chez lui, de ne pas participer à ces séances puisqu’il les considère comme une perte de temps. Alors qu'au contraire, il s’agit d’une bonne nouvelle à répandre.  La majorité des participants à ces séances, à l’instar de Ange Okpodji, ivoirien d’origine, les jugent très formatrices et même incontournables.

 

 

L’auteur de cet article, Doudou Sow ( This e-mail address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it ) vit au Canada.  Il est un sociologue de formation, spécialisé en Travail et organisations.  Il est actuellement conseiller en emploi pour le projet Québec-Pluriel Mentorat au Carrefour jeunesse-emploi Bourassa-Sauvé (Canada).  Il a accordé des entrevues à la Société d’État Radio-Canada International.  Il a aussi été conférencier  (à l’Université de Montréal en 2009).

 

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1 Pour plus d’informations allez à: http://www.doudousow.qc.ca/html/integ-amicale-ivoiriens.html