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L’âgisme Envers Les Aînés PDF Print E-mail
Written by Patricia Turnier   
Sunday, 21 February 2010 21:59

Par définition, l’âgisme représente une discrimination envers des individus du fait de leur âge.  Ce vocable symbolise un caméléon qui prend diverses couleurs:  une mise à la retraite obligatoire, la condamnation aux loisirs forcés, l’infantilisation des personnes âgées.  Il a sa source dans le fait d’aborder le vieillissement de la population comme étant un problème dans la société (au lieu d’une richesse) où l’on accorde une grande place à la productivité, à la performance, à la compétition et à des rapports utilitaires, le fait de percevoir les gens âgés comme des êtres asexués (en d’autres mots, une négation du besoin d’intimité des personnes de l’âge d’or), etc.

L’âgisme représente ainsi une mise à l’écart qui donne peu de voix au chapitre aux aînés et qui peut créer chez eux une démobilisation, une dépossession et à la limite une dépersonnalisation.  En l’occurrence, il est question également d’un déni ou d’un refus du droit à la sénescence dans notre société qui se traduit de diverses façons et parfois subtilement :  le manque de représentativité des personnes âgées dans le domaine cinématographique; la prolifération d’annonces sur les crèmes « anti-vieillissantes » constitue un autre exemple éloquent et révélateur de l’âgisme par son culte de la jeunesse (accompagné d’une « survalorisation » ou une sacralisation de l’esthétisme).  D’ailleurs, c’est le plus souvent en comparant à la jeunesse que l’on définit la sénescence. Tout cela dévoile les nouveaux visages de l’âgisme. 

Ces préjugés sociaux stéréotypés et cette conception négative du vieillissement ont la possibilité de créer une angoisse à avancer en âge qui est envisagée par certains dans son aspect défensif :  un repli sur le passé.  Or, envisager le vieillissement uniquement sur le versant du déclin, c’est occulter toute une partie évolutive.  Ces différentes attitudes et stéréotypes sont susceptibles d’influer directement sur les personnes âgées qui finissent par intérioriser ces pensées négatives se traduisant par une perte d’estime de soi, d’identité sociale, etc.  Dans ces situations, il arrive qu’elles soient moins conscientes du traitement qu’on leur inflige.  De cette façon, un aîné qui sent ses capacités et sa productivité diminuer risque de s’estimer insuffisamment important pour qu’on fasse preuve d’attention et de patience à son égard.  Il est capable de penser qu’il n’a pas le droit de s’affirmer.  Certaines personnes âgées s’assignent elles-mêmes des limites à leur vie.  Il existe donc un lien entre les stéréotypes rattachés à l’âgisme adoptés par la société et par l’aîné lui-même.

Une nécessité de percevoir l’âge d’or comme une richesse, un trésor et un puits d’expériences s’impose donc dans notre société.  La vieillesse permet de faire bénéficier aux autres de sa sagesse et du savoir acquis tout au long d’une vie ce qui représente un atout précieux.  L’âge d’or donne la possibilité de construire sa vie en intégrant son histoire passée, exemplaire car unique, au présent afin de mieux se projeter encore dans l’avenir. Ce temps n’est donc pas en rupture avec le temps passé, et la vieillesse se construit sur les assises de ce qui a précédé.  Ainsi, chacun produit l’âge d’or, en fonction de ce qu’il est et de ce qu’il a été.  Le vieillissement constitue un processus dynamique où l’homme n’est pas figé dans un état d’attente passive, mais il est encore en train de construire sa vie avec de nouvelles aspirations.  Il importe également dans notre société de transformer et de renforcer les rapports entre les générations afin de préserver notamment les valeurs, les traditions et les transmissions d’un patrimoine de connaissances.  Ainsi, une réflexion s’impose.

Sur ce, je vous laisse avec cette merveilleuse citation du poète américain Henry Wadsworth Longfellow du 19ème siècle:  « La vieillesse offre autant de possibilités que la jeunesse, mais elles prennent d’autres visages.  À mesure que le soir tombe apparaissent dans le firmament des étoiles qu’on ne pouvait voir le jour »

Article diffusé entre autres sur www.toronto-franco.com et pour le Flambeau, vol.  4 no 2 en janvier 2008 (A.R.E.Q.), Association des enseignants retraités du Québec, la plus grosse association pour les professionnels retraités de la Belle Province fondée en 1951 (ayant plus de 50 000 membres provenant de divers milieux :  éducation, culture, communication, santé, services sociaux, etc).  On a également fait référence à cet article en juin 2009 au Journal de l'Association des directions d'établissements scolaires retraités de l'Outaouais québécois (no 54) intitulé Au fil des ans.